À 48 ans, après une mammographie de contrôle et une biopsie, on m’a annoncé que j’avais un cancer. L’annonce a été assez traumatisante, pour moi comme pour mes proches : j’ai eu l’impression d’avoir lâché une bombe dans ma famille. C’était un tsunami dans notre vie, ça a été très violent. J’ai dû l’accepter, faire un travail sur moi, passer au-delà de la colère. C’est une maladie où on attend toujours quelque chose (les annonces, les opérations, les traitements, les résultats…) et l’attente a été longue.
Je m’étais préparée à ce qu’on me dise qu’on allait m’enlever le sein, j’avais commencé mon deuil. À la place du sein, il reste un trou, un « vide ». Je m’y étais préparée pour que ce soit moins violent après l’opération. J’ai fait comme s’il ne faisait plus partie de mon corps : je ne le regardais plus, je ne le touchais plus. En me renseignant sur la reconstruction esthétique, j’ai vu la lourdeur des chirurgies et des traitements, et c’était inenvisageable pour moi ! Je voulais qu’on me laisse tranquille, qu’on ne touche plus à mon corps.
Même si j’avais accepté la perte de mon sein, il était assez difficile de me regarder dans le miroir : je voyais le décalage avec mon autre sein et ça me renvoyait à mon traumatisme. En cherchant un autre moyen pour accepter ma cicatrice, j’ai vu le travail des tatoueuses engagées dans l’association Sœurs d'Encre. J’ai participé à la troisième édition de Rose Tattoo, et c’était une aventure merveilleuse !
Le tatouage a mis un point final à la maladie, la douleur est partie. J’ai pu me regarder à nouveau dans un miroir, remettre des T-shirts à bretelles, des vêtements près du corps… alors qu’auparavant je me camouflais, je ne me regardais plus. Grâce à lui, j’ai commencé à accepter mon nouveau corps, à le réapprivoiser. Lorsque je le regarde, je me trouve belle, je le touche, alors qu’avant c’était impossible ! C’est une reconstruction qui m’a énormément apporté. Malgré la perte de mon sein, je me sens à nouveau féminine. Je ne vois plus le vide et le long parcours que j’ai enduré.
Retranscription du témoignage par Mélissa Castillon.